"Avec un peu d'imagination et de style, rien de plus aisé que de filer un roman." Jacques le Fataliste - Diderot

Publié dans : Romans XX°

le 12/2/10

http://milkymoon.cowblog.fr/images/Livres/Lamiretrouve.jpg L'ami retrouvé
Fred Uhlman
1971

Challenge ABC : 15/26

Quatrième de couverture
Âgé de seize ans, Hans Schwarz , fils unique d'un médecin juif, fréquente le lycée le plus renommé de Stuttgart. Il est encore seul et sans ami véritable lorsque l'arrivée dans sa classe d'un garçon d'une famille protestante d'illustre ascendance lui permet de réaliser son exigeant idéal de l'amitié, tel que le lui fait concevoir l'exaltation romantique qui est souvent le propre de l'adolescence. C'est en 1932 qu'a lieu cette rencontre, qui sera de courte durée, les troubles déclenchés par la venue de Hitler ayant fini par gagner la paisible ville de Stuttgart. Les parents de Hans, qui soupçonnent les vexations que subit le jeune homme au lycée, décident de l'envoyer en Amérique, où il fera sa carrière et s'efforcera de rayer de sa vie et d'oublier l'enfer de son passé. Ce passé qui se rappellera un jour à lui de façon tragique.

Avis
Une courte histoire, agréable à lire. On peut facilement se retrouver dans le personnage de Hans et sa définition de l'amitié. L'expression de ses sentiments, "l'exaltation romantique" comme dit le résumé, m'a fait sourire car il m'a vraiment rappelé moi à une époque. Leur amitié se développe dans une bulle, ils vivent leur relation coupés de tout. Après je n'ai pas grand chose de plus à ajouter sur ce livre. Je n'ai pas vraiment été embarquée par l'histoire, du fait qu'elle soit très courte sans doute. La fin est surprenante, inattendue. Comme quasiment tout le monde, j'ai lu ce livre dans le cadre du challenge ABC parce que je n'avais pas d'idée d'auteur en U. Bilan : je chercherai mieux l'année prochaine.
 
En résumé : Mouais.


Extrait
"Réclamer la Palestine après deux mille ans n'avait pas pour lui plus de sens que si les Italiens revendiquaient l'Allemagne parce qu'elle avait été jadis occupée par les Romains."

Publié dans : Romans XX°

le 10/2/10

http://milkymoon.cowblog.fr/images/Livres/ladisparitiondegeorgeperec.gif La disparition
G.P.
1969


Concours ABC : 14/26

Trahir qui disparut, dans La disparition, ravirait au lisant subtil tout plaisir. Motus donc, sur l'inconnu noyau manquant - « un rond pas tout à fait clos finissant par un trait horizontal » -, blanc sillon damnatif où s'abîma un Anton Voyl, mais d'où surgit aussi la fiction. Disons, sans plus, qu'il a rapport avec la vocalisation. L'aiguillon paraîtra à d'aucuns trop grammatical. Vain soupçon : contraint par son savant pari à moult combinaisons, allusions, substitutions ou circonclusions, jamais G.P. N'arracha au banal discours joyaux plus brillants ni si purs. Jamais plus fol alibi n'accoucha d'avatars si mirobolants. Oui, il fallait un grand art, un art hors du commun, pour fourbir tout un roman sans ça !

Avis
Voilà un roman qui m'apparaît plus qu'original. Un parfait duo liant un fond à "l'incisif plaisir du bon mot". Loin d'avoir un charabia sibyllin, un galimatias confus, un imbroglio, G.P montra ici non sans brio qu'on pouvait obscurcir, assombrir à jamais l'inscription qui nous suivait, paraissant comme la Damnation, dans tout mot. Pari contraignant, mais il voila "un rond pas tout à fait clos finissant par un trait horizontal". Quant au brillant plan du roman ; avatars aussi furtifs qu'attachants, puis un fatal sort qui nous apparaît à la fin trop clair. Bravissimo donc, au grand scribouillard d'Oulipo.


Citations
* "Un charabia sibyllin, un galimatias diffus. Un imbroglio."

* "Un sanglot aussi long qu'un violon automnal."

* "mis sur son vingt-huit plus trois"

* "Nom d'un Toutou !"

* "Marchons, marchons ! D'un sang impur irriguons nos sillons."

* "Pourquoi toujours vouloir unir un Pourquoi à la Mort ?"

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En savoir plus

 Après m'être pliée à cet exercice, rien n'est plus vrai que l'aphorisme de Boileau : ce qui ce conçoit bien s'énonce clairement, et les mots pour le dire viennent bien plus aisément. Vous n'avez sans doute rien compris à mon charabia, don't worry, je me trouvais dans le même état après la lecture du résumé. Sachant le défi que s'était fixé Perec, au début je dois dire que je guettais les mots du coin de l'oeil, je les attendais avec retenue, j'étais attentive à la manière dont l'écrivain allait s'y prendre pour tenir 300 pages. Je prêtais plus attention aux mots eux mêmes qu'au sens de l'histoire. Au fil des pages, je me suis finalement faite à l'idée qu'une voyelle manquait au bouquin et que Perec était un pur génie, l'histoire m'est alors apparue aussi impressionnante que le défi de l'auteur. Tout est lié. La forme est au service du fond. On a à faire à une succession de morts "inexplicables" des personnages. Le roman se construit tel une enquête, on avance de révélations en révélations, le tout sur un style léger, qui ne se prend pas du tout au sérieux. J'ai vraiment trouvé ce livre excellent, transcendant. Par ses inventions, ses détours de la langue pour arriver à s'exprimer tout en respectant son pari, Perec m'a également fait réfléchir sur les mots, leur utilisation, leur étymologie, leur sens. L'auteur faisait parti de l'OuLiPo ; Ouvroir de Littérature Potentielle, dont Queneau que j'adore était aussi un membre.
Il paraitrait que "la disparition" du e pourrait être mise en relation avec la disparition des parents de l'écrivain durant la guerre.
Si une autre oeuvre lipogrammatique ("à qui il manque une lettre ») vous intéresse, il existe si je puis dire l'opposé du livre : Les Revenentes.

En résumé : Un livre extravagant et intelligemment construit, à s'y plonger sans plus attendre. Surement une de mes meilleures lectures.

 

Publié dans : Romans XX°

le 18/12/09

http://milkymoon.cowblog.fr/images/Livres/peste.jpgLa Peste
Albert Camus
1947

Quatrième de couverture
"- Naturellement, vous savez ce que c'est, Rieux ?
- J'attends le résultat des analyses.
- Moi, je le sais. Et je n'ai pas besoin d'analyses. J'ai fait une partie de ma carrière en Chine, et j'ai vu quelques cas à Paris, il y a une vingtaine d'années. Seulement, on n'a pas osé leur donner un nom, sur le moment... Et puis, comme diqait un confrère : "C'est impossible, tout le onde sait qu'elle a disparu de l'Occident." Oui, tout le monde le savait, sauf les morts. Allons, Rieux, vous savez aussi bien que moi ce que c'est...
- Oui, Castel, dit-il, c'est à peine croyable. Mais il semble bien que ce soit la peste."


Avis
J'ai eu un gros coup de coeur pour ce livre. C'était la première fois que je lisais du Camus, et cette lecture m'a donné envie d'en découvrir d'avantage sur l'auteur. Tout le long du livre, on a cette atmosphère étouffante de peste, qui croît de chapitre en chapitre, jusqu'à arriver à son paroxysme puis rechuter. Toutes les phases de l'épidémie sont décortiquées. Le narrateur (et médecin) nous livre la lutte des personnes contre la maladie, leur  impuissance, leur dernier combat contre la mort. Cette histoire de peste vous captive du début à la fin, c'est admirablement bien mené.

Mon personnage préféré était Joseph Grand. Il paraît très inintéressant à première vue, mais j'ai beaucoup aimé son histoire. Il a pour ambition d'écrire un livre, mais n'arrive même pas à achever sa première phrase. "Par une belle matinée de mai, une svelte amazone montée sur une somptueuse jument alezane parcourait les allées pleines de fleurs du Bois de Boulogne." Tout le long du roman, il la remanie, et ça ne change absolument rien. Ca rappelle étrangement "Belle marquise vos beaux yeux me font mourir d'amour", non ?

En revanche y'a quelque chose qui m'échappe au niveau de l'incipit, apparemment ça ferait allusion au nazisme mais je n'en sais pas plus, si quelqu'un peut m'éclairer...Sur ce je vous souhaite d'excellentes vacances de Noël !

En résumé : Une histoire menée par un style remarquable qui m'a captivée du début à la fin.


Extrait
"-Depuis, j'ai un peu réfléchi.
-A quoi ?
-Au courage. Maintenant je sais que l'homme est capable de grandes actions. Mais s'il n'est pas capable d'un grand sentiment, il ne m'intéresse pas.
-On a l'impression qu'il est capable de tout.
-Mais non, il est incapable de souffrir ou d'être heureux longtemps. Il n'est donc capable de rien qui vaille. Voyons, êtes-vous capable de mourir pour un amour?
-Je ne sais pas, mais il me semble que non, maintenant.
-Voilà. Et vous êtes capable de mourir pour une idée, c'est visible à l'oeil nu. Eh bien, moi, j'en ai assez des gens qui meurent pour une idée. Je ne crois pas à l'héroïsme, je sais que c'est facile et j'ai appris que c'était meurtrier. Ce qui m'intéresse, c'est qu'on vive et qu'on meure de ce qu'on aime."

Publié dans : Romans XX°

le 12/12/09

http://milkymoon.cowblog.fr/images/Livres/zweig.jpgLettre d'une inconnue
(Brief einer Unbekannten)
Stefan Zweig
1927

Challenge ABC : 12/26


Quatrième de couverture :
Un amour total, passionnel, désintéressé, tapi dans l'ombre, n'attendant rien en retour que de pouvoir le confesser. Une blessure vive, la perte d'un enfant, symbole de cet amour que le temps n'a su effacer ni entamer. Une déclaration fanatique, fiévreuse, pleine de tendresse et de folie. La voix d'une femme qui se meurt doucement, sans s'apitoyer sur elle-même, tout entière tournée vers celui qu'elle admire plus que tout.
Avec Lettre d'un inconnue Stefan Zweig pousse plus loin encore l'analyse du sentiment amoureux et de ses ravages, en nous offrant un cri déchirant d'une profonde humanité. Ici nulle confusion des sentiments : la passion est absolue, sans concession, si pure qu'elle touche au sublime.

Avis :
Mon avis rejoint entièrement la quatrième de couverture. Comment ne pas être touché par ce cri d'amour et de désespoir ? J'ai retrouvé la sublime écriture de Zweig que j'avais tant appréciée dans Le joueur d'échecs. J'ai retrouvé des sentiments poussés à l'extrême. Merci aux personnes qui m'ont conseillé cette petite merveille :)!

En résumé : J'ai retrouvé la magnifique plume de Zweig qui arrive à me captiver et me véhiculer des sentiments forts.

Publié dans : Romans XX°

le 19/11/09

http://milkymoon.cowblog.fr/images/Livres/Lejoueurdechecs14597x1.jpg Le joueur d'échecs
(Schachnovelle)
Stefan Zweig
1943


Quatrième de couverture
Qui est cet inconnu capable d'en remontrer au grand Czentovic, le champion mondial des échecs, véritable prodige aussi fruste qu'antipathique ? Peut-on croire, comme il l'affirme, qu'il n'a pas joué plus de vingt ans ? Voilà un mystère que les passagers oisifs de ce paquebot de luxe aimeraient bien percer.
Le narrateur y parviendra. Les circonstances dans lesquelles l'inconnu a acquis cette science sont terribles. Elle nous reportent aux expérimentations nazies sur les effets de l'isolement absolu, lorsque, aux frontières de la folie, entre deux interrogatoires, le cerveau humain parvient à déployer ses facultés les plus étranges.
Une fable inquiétante, fantastique, qui comme le dit le personnage avec une ironie douloureuse, "pourrait servir d'illustration à la charmante époque où nous vivons".

Avis
C'est un livre très court, mais ce qu'il contient est très fort. D'un côté on a l'histoire de Czentovic, qui ne m'a pas plus emballée que ça. J'en garde l'image d'un homme pas très intelligent, assez banal, voir même sans émotions, mais qui néanmoins développe une aptitude pour les échecs (hé oui il y a des dons qui ne s'expliquent pas). De l'autre côté, on a ce personnage emprisonné, qui trouve le moyen de faire passer le temps et l'ennui en jouant aux échecs. Cette partie m'a vraiment accrochée, le personnage est très intéressant psychologiquement. Par exemple, il en arrive à faire des parties d'échecs mentalement, en jouant contre lui-même. Imaginez, vous savez ce que vous allez jouer puisque vous jouez contre vous même, il faut vous tendre des pièges, anticiper plusieurs coups à l'avance... c'est une gymnastique intellectuelle à la limite de la schizophrénie. Il y a un contraste évident entre les deux personnages : Czentovic, calme, froid, et "l'inconnu", vif et rempli d'émotion. Quelle sera l'issue de leur partie d'échecs ?
Ca me prouve une fois de plus mon penchant pour les récits de prisonniers. J'ai définitivement adoré ce livre.

En résumé : J'ai adoré l'histoire du prisonnier : ses parties d'échec mentales ainsi que ses émotions.

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