"Quand un passage lui plaisait particulièrement, il le répétait autant de fois qu'il l'estimait nécessaire pour découvrir combien le langage humain pouvait être aussi beau." Le vieux qui lisait des romans d'amour - Sepúlveda

Publié dans : Théâtre

le 21/7/10

http://milkymoon.cowblog.fr/images/hamlet.jpgLa Tragédie d'Hamlet, Prince du Danemark
William Shakespeare
entre 1599 et 1601

Challenge Livraddict 2010 : 3/7

Quatrième de couverture
"II y a quelque chose de pourri au royaume du Danemark !" Le soir venu, le spectre du roi défunt hante les brumes du château d'Elseneur.
II crie vengeance. Honte à son frère Claudius, le lâche assassin ! Hamlet, son fils, a promis... Ce crime ne restera pas impuni. Mais au bord du gouffre, le voilà qui vacille : "Être ou ne pas être ?" Jeu de miroirs, faux-semblants... Théâtre dans le théâtre... Folie simulée ou véritable démence ? Le meurtre est pourtant bien réel. Et la mort d'Ophélie annonce d'autres désastres. Au coeur de la tragédie jaillissent alors les voix mystérieuses du pouvoir et de la guerre, de l'amour et de la mort.
La poésie de Shakespeare fuse à chaque instant en vocalises sublimes, composant ici le mythe universel d'une humanité confrontée à ses propres démons...

Avis
Dur dur de commenter un si grand classique, mais je vais essayer de rendre au mieux mes impressions. J'étais partie au début pour lire cette pièce en anglais, pas du tout par prétention, plutôt pour juger par moi-même de l'écriture de Shakespeare. J'avais déjà lu quelques pièces de lui, mais les traductions ne peuvent pas égaler un texte en version originale, surtout quand il s'agit de théâtre. Bref, j'ai donc lu tout le premier acte en VO, et je vous dis : heureusement que j'ai relu après en français, sinon je serais passée à coté de certains détails très importants x). En plus c'est du vieil anglais, je m'y connais pas trop. Mais bon, contente d'avoir pu voir un tout petit peu à quoi ça ressemblait du "vrai" Shakespeare.

Avant que je lise cette pièce, on m'avait raconté que tous les personnages principaux mourraient, j'avais donc hâte de savoir pourquoi et comment. Au final, Hamlet n'est l'auteur "que" de deux meurtres, dont un provoqué accidentellement. Je suis peut-être grave, mais dans la dernière scène, quand ils meurent quasiment tous à la suite, ça m'a fait marrer. On trouve aussi des batailles pour conquérir des royaumes, tout le toutim habituel j'ai envie de dire. D'ailleurs une petite remarque qui n'a pas beaucoup d'importance, mais ici aussi ils se battent pour le royaume de Pologne. Je sais pas si c'est la mode ou quoi dans les pièces de théâtre puisque c'est également le cas dans La Vie est un Songe et dans Ubu Roi, et sûrement d'autres... Bref, la pièce est bel et bien une tragédie, au sens qu'on trouve habituellement dans les pièces de théâtre. Mais c'est aussi une tragédie intérieure au personnage d'Hamlet. Il connaît le doute, l'illusion, se rend compte de la vanité de l'existence, cherche à s'en libérer, c'est ce qui rend le texte si fort j'ai trouvé.

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La Mort d'Ophélie, John Everett Millais

L'illusion, la vanité ; des thèmes bien propres au baroque. On retrouve également du théâtre dans le théâtre - soit une mise en abîme - lorsque des comédiens font leur apparition. Au cours de cette lecture, la pièce m'a beaucoup fait penser à La Vie est un Songe, de Calderón, parce que Hamlet ne sait plus ce qui est vrai et ce qui ne l'est pas, ce qui est réel et ce qui est rêve (le fameux "To be or not to be"). En même temps on comprend son doute, puisqu'il voit ressurgir le fantôme de son père défunt... J'ai donc trouvé que cette tragédie avait un côté baroque, et ça m'a beaucoup plu. La plupart des tirades d'Hamlet donnent un caractère pathétique - mais non moins superbe - aux scènes : il hésite, ne sait plus que croire, feint la folie, cherche à venger la mort de son père. Un des moments les plus forts de la pièce - et mon préféré - est lorsqu' Hamlet s'adresse à un crâne déterré dans le cimetière, se rendant compte que chaque être est quoi qu'il arrive destiné à mourir : "All that lives must die, passing through nature to eternity". C'est une pièce que j'aurais aimé étudier en cours, car je pense être passée à côté de certaines choses importantes.

En résumé : Pièce que j'ai trouvé extrêmement intéressante et que j'aimerais avoir l'occasion d'approfondir.


Extraits
* "I'll cross it, though it blast me. Stay, illusion! If thou hast any sound, or use of voice, speak to me."

* "A little more than kin, and less than kind. "

* "All that lives must die, passing through nature to eternity."

* "On a fait croire que, tandis que je dormais dans mon jardin, un serpent m'avait piqué. Ainsi, toutes les oreilles du Danemark ont été grossièrement abusées par un récit forgé de ma mort. Mais, sache-le, toi, noble jeune homme! le serpent qui a mordu ton père mortellement porte aujourd'hui sa couronne."

* "Il n’y a de bien et de mal que selon l’opinion qu’on a."

* "Ils sont le résumé, la chronique abrégée des temps." (à propos des comédiens)

* "Mettez l’action d’accord avec la parole, la parole d’accord avec l’action, en vous appliquant spécialement à ne jamais violer la nature; car toute exagération s’écarte du but du théâtre qui, dès l’origine comme aujourd’hui, a eu et a encore pour objet d’être le miroir de la nature, de montrer à la vertu ses propres traits, à l’infamie sa propre image, et au temps même sa forme et ses traits dans la personnification du passé."

* "Pardonne-moi ces paroles, ô ma vertu ! car, au milieu d’un monde devenu poussif à force d’engraisser, il faut que la vertu même demande pardon au vice, il faut qu’elle implore à genoux la grâce de lui faire du bien."

* "I must be cruel, only to be kind" : "Il faut que je sois cruel, rien que pour être humain".

* "Me prenez-vous pour une éponge, monseigneur ?"

Publié dans : Théâtre

le 21/3/10

http://milkymoon.cowblog.fr/images/Livres/uburoi.jpgUbu Roi
Alfred Jarry
1896

Challenge ABC : 20/26

Résumé
Le Père Ubu, convaincu par son épouse, décide de renverser le roi de Pologne pour prendre sa place et régner comme bon lui semblera sur le royaume...

Avis
Hum que dire que dire... Une pièce qui se laisse lire, mais sans plus. Au théâtre on est habitué à des histoires d'amour impossibles (exemple, exemple, exemple, exemple), dans cette pièce c'est un tout autre sujet. Le héros est un personnage bouffon, immoral et grossier, et veut renverser le roi de Pologne avec l'aide de sa femme qui n'est pas mieux que lui : voleuse, ivrogne et manipulatrice.
Cette pièce m'a un peu rappelé La Cantatrice Chauve de Ionesco. On a en effet des personnages grotesques (Père Ubu et Mère Ubu), une situation vraiment improbable... La pièce rompt avec le théâtre plus "classique". On dit d'ailleurs d'elle qu'elle est le précurseur du théâtre de l'absurde ; théâtre qu'on retrouve totalement dans La Cantatrice Chauve.
En même temps, cette pièce m'a beaucoup fait penser à La Vie est un Songe de Calderón. L'action se passe en Pologne, il y a des grottes en veux-tu en voilà, de la neige, des peaux d'ours, des rois qui dilapident leur fortune, un personnage qui s'appelle Sigismond et un autre Rosemonde.

En résumé : Une pièce qui s'annonce en rupture avec le théâtre "classique", mais qui ne m'a pas plus emballée que ça.


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Et ô surprise, j'étais en train de chercher l'image du livre quand je suis tombée sur ça.
Oui les amis, le tableau d'el Señor Joan Miró sur Ubu Roi. Y'en a toute une série d'ailleurs.
J'aime beaucoup Miró, mais là j'ai franchement du mal à voir quel moment de la pièce ça illustre.

Publié dans : Théâtre

le 3/1/10

http://milkymoon.cowblog.fr/images/Livres/calderon.png La vie est un songe
(La vida es sueño)
Pedro Calderón de la Barca
1635

Résumé
Dans une Pologne fictive, le roi Basile a eu la prédiction que son fils Sigismond deviendrait un tyran. Voulant protéger son peuple, Basile enferme son fils à sa naissance, dans une grotte, sans jamais voir personne. Allant bientôt mourir, Basile décide le temps d'une journée de tester son fils en le mettant sur le trône.

Avis
Une des pièces de théâtre que j'ai préférées. L'intrigue est loin d'être simple, les thèmes abordés originaux. Il y a plein de métaphores dans ce texte. Le baroque y est omniprésent : la vanité, l'illusion, la mort... Il y a tellement à dire dans l'interprétation de cette pièce, elle est si riche, c'est ça qui me plait.

D'emblée, le titre met en rapprochement vie et rêve, réalité et illusion. Toute l'intrigue de la pièce va se jouer sur cette limite. La pièce se compose de 3 actes qui symbolisent 3 journées. Lors de la première journée Sigismond est enfermé dans la grotte avec son instructeur Clotalde (unique contact). Durant la deuxième journée  il a accès au pouvoir mais se comporte abominablement. A la fin de la journée on le réenferme. Il se demande alors si ce qu'il a vécu était un rêve, les frontières entre le réel et l'iréel se font floues. La troisième journée, croyant donc rêver, il décide d'agir justement : "je rêve, et je veux agir selon le bien, car on ne perd rien à faire le bien, même en songe". L'oracle du père se révèle faux, Calderón prouve qu'il n'existe aucune fatalité. Au contraire, c'est à cause de son père et de son enfermement que Sigismond est devenu une bête féroce. Je pourrais encore développer d'autres points tellement cette pièce donne matière à réfléchir. J'ai totalement adoré.

En résumé : Une pièce génialissime qui joue sur l'ambigüité rêve/ réalité.


Extrait
"Il est tant de plaisir à se plaindre,
disait un philosophe,
que rien que pour le plaisir de se plaindre
on devrait recherche les malheurs".

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