"Ce texte s'arrêtera au moment exact de ma mort." Journal d'Hirondelle - Nothomb

Publié dans : Théâtre

le 30/5/10

http://milkymoon.cowblog.fr/images/cook.jpgSupplément au voyage de Cook
Jean Giraudoux
1935

Résumé

Mr et Mrs Banks, naturalistes de l'équipage du capitaine Cook, débarquent à O'Tahiti : puritains anglais du XVIIIe siècle, ils doivent inculquer aux indigènes les trois piliers sacrés de leur civilisation : Travail, Propriété et Moralité. Les autochtones opposent prodigalité, liberté, et insouciance. Les Banks voient leurs certitudes vaciller.

Avis
On est en 1935 quand Giraudoux écrit cette pièce, ce n'est plus l'époque des grands discours satiriques sur la colonisation, comme l'avaient fait autrefois de nombreux auteurs, et notamment Diderot dans "Supplément au voyage de Bougainville". Giraudoux reprend l'idée et la reconcocte à sa sauce pour en faire quelque chose de drôle et léger. Les thèmes de l'altérité, de l'esclavage, de la colonisation de l'Homme blanc sont présents, of course. Mais c'est dans l'humour que Giraudoux aborde le sujet, et j'ai totalement adoré. Il y a continuellement une confrontation entre les coutumes des colons et les coutumes des indigènes, et on voit bien qu'elles sont incompatibles. Je ne vais pas vous faire un cours sur ces différences culturelles, vous les imaginez bien. Je cherche surtout à mettre l'accent sur la manière dont l'auteur s'y prend pour en parler et que j'ai trouvée géniale. Les Banks qui pensaient contrôler les tahitiens pour se faire de l'argent, se retrouvent malgré eux à adopter leur mode de vie et leur mentalité, ce qui donne lieu à des situations et des dialogues excellents. En plus j'ai pu voir cette pièce au théâtre, et voir une pièce au théâtre vaut mille fois mieux que de la lire, c'est certain.

En résumé : J'ai adoré avec quel trait d'humour Giraudoux dépeignait la colonisation.

Publié dans : Théâtre

le 24/10/09

http://milkymoon.cowblog.fr/images/Livres/valladolid.jpgLa controverse de Valladolid
Jean-Claude Carrière
1992

Quatrième de couverture
Dans un couvent de Valladolid, quelque soixante ans après la découverte du Nouveau Monde, deux homme s'affrontent dans un débat passionné : les Indiens sont-ils des hommes comme les autres ? Pour le dominicain Las Casas, ardent défenseur de la cause indienne, cela ne fait aucune doute : les Espagnols, avides de conquête, ont nié l'évidence, assujettissant et massacrant les indigènes par millions. Face à lui, le philosophe Sépulvéda affirme que certains peuples sont nés pour être dominés. Tous deux s'entendent sur un point : le nécessaire salut des âmes. L'issue de cette confrontation, déterminante pour des millions d'hommes, pourrait bien être surprenante...

Avis
Un livre intéressant qui traite du thème de l'altérité, et ce sujet a été d'actualité plus d'une fois dans l'Histoire. C'est assez risible de voir qu'un homme comme Sépulvéda, qui affirme que certains peuples sont nés pour être dominés, était reconnu comme un philosophe à l'époque. Comme quoi les valeurs évoluent, tout est relatif à l'époque, à la société, et qui sait peut-être que dans 500 ans le monde aura évolué d'une manière étonnante. L'intérêt de ce livre réside dans la discussion, le débat, d'où l'idée de l'avoir écrit sous forme d'une pièce.  La pièce est surtout centrée sur l'argumentation, convaincre l'autre. Pour ça on pourrait reprocher qu'il manque un peu d'action, de rythme. Pour l'info, Valladolid est une ville du cente de l'Espagne. En annexe dans le livre, quelques pistes de lecture sont données sur le thème de l'altérité, et comme je trouvais ça pas mal fait les voici :

L'autre, le connaître, le respecter
¤ L'autre, sujet de curiosité
→ "Des cannibales" Essais, Montaigne
¤ L'autre, objet de tolérance
Supplément au voyage de Bougainville, Diderot
¤ L'autre, le modèle utopique
"Chapitre XVIII L'Eldorado" Candide, Voltaire

L'autre, le mépriser, le détruire
¤ Haine de l'autre
Essai sur l'inégalité des races humaines, Gobineau
¤ Humiliation de l'autre
Voyage au bout de la nuit, Céline
¤ Anéantissement de l'autre
Si c'est un homme, Levi

En résumé : J'ai bien aimé le sujet traité dans cette pièce, les débats autour de l'égalité des hommes. C'est dommage qu'il n'y ait pas eu un peu plus d'actions pour rythmer la pièce.

Publié dans : Romans XVIII°

le 16/9/09

http://milkymoon.cowblog.fr/images/Livres/diderot.gif Jacques le fataliste
Denis Diderot
1780
 
Quatrième de couverture
"Comment s'étaient-ils rencontrés ? Par hasard, comme tout le monde. Comment s'appelaient-ils ? Que vous importe ? D'où venaient-ils ? Du lieu le plus prochain. Où aillaient-ils ? Est-ce que l'on sait où l'on va ? Et que disaient-ils ? Le maître ne disait rien, et Jacques disait que son capitaine disait que tout ce qui nous arrive de bien et de mal ici-bas était écrit là-haut."
D'entrée de jeu, c'est sous le signe de l'incertitude et de l'ironie que Diderot place le roman qu'il publie de 1778 à 1780. Jacques et son maître devisent en voyageant, mais bientôt le récit des amours de Jacques s'interrompt, ouvre à d'autres histoire et à d'autres rencontres dans ce livre admirablement virtuose où la parole circule de narrateur en narrateur. La parole, mais aussi bien la réflexion sur notre liberté et sur le fatalisme qui fit de Jacques un manuel de gai savoir en même temps que ce roman toujours neuf dont l'esthétique de la rupture, de la provocation et du rebond fonde encore la modernité.

Avis
On passe de l'histoire des amours de Jacques à celle de l'hôtesse, on revient sur le récit du maître, ... incessamment. Il y a en quelque sorte 3 degrés dans ce roman : le premier étant le narrateur, tirant sur les ficelles de ses marionnettes. Au 2ème degré, on suit les aventures de Jacques et son maître, au 3ème on a des récits  enchâssés dans le récit principal.  Diderot jongle entre ces 3 niveaux, j'ai trouvé ça excellent.

En résumé : J'ai trouvé ce livre excellent, intelligent, audacieux, original, et remarquablement bien construit.


Extraits
* "Pourrais-tu me dire ce que c'est qu'un fou, ce que c'est qu'un sage ?"

* "Ah! Si je savais dire comme je sais penser ! Mais il était écrit là-haut que j'aurais les choses dans me tête et que les mots ne me viendraient pas."

* "Chacun apprécie l'injure et le bienfait à sa manière, et peut-être n'en portons-nous pas le même jugement dans deux instants de notre vie."

* "Telle est la différence de deux hommes braves par caractère, mais dont l'un est sage, et l'autre a un grain de folie."

* "Tout ce qui reluit n'est pas d'or."

* "Plus de ces morceaux d'une éloquence sublime, plus de ces productions marquées au coin de l'ivresse et du génie : tout est raisonné, compassé, académique et plat."

* "Avec un peu d'imagination et de style, rien de plus aisé que de filer un roman."

* "A force de vouloir montrer de l'esprit, vous n'êtes qu'une bête."

* "- Et pourquoi haïssez-vous les portraits ?
- C'est qu'ils ressemblent si peu, que si par hasard on vient à rencontrer les originaux, on ne les reconnait pas."

* "On passe les trois quarts de sa vie à vouloir sans faire."

* "Ils songent à eux, et tout dans la nature songe à soi et ne songe qu'à soi. Que cela fasse du mal aux autres, qu'importe, pourvu qu'on s'en trouve bien ?"

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