"Quand un passage lui plaisait particulièrement, il le répétait autant de fois qu'il l'estimait nécessaire pour découvrir combien le langage humain pouvait être aussi beau." Le vieux qui lisait des romans d'amour - Sepúlveda

Publié dans : Théâtre

le 21/7/10

http://milkymoon.cowblog.fr/images/hamlet.jpgLa Tragédie d'Hamlet, Prince du Danemark
William Shakespeare
entre 1599 et 1601

Challenge Livraddict 2010 : 3/7

Quatrième de couverture
"II y a quelque chose de pourri au royaume du Danemark !" Le soir venu, le spectre du roi défunt hante les brumes du château d'Elseneur.
II crie vengeance. Honte à son frère Claudius, le lâche assassin ! Hamlet, son fils, a promis... Ce crime ne restera pas impuni. Mais au bord du gouffre, le voilà qui vacille : "Être ou ne pas être ?" Jeu de miroirs, faux-semblants... Théâtre dans le théâtre... Folie simulée ou véritable démence ? Le meurtre est pourtant bien réel. Et la mort d'Ophélie annonce d'autres désastres. Au coeur de la tragédie jaillissent alors les voix mystérieuses du pouvoir et de la guerre, de l'amour et de la mort.
La poésie de Shakespeare fuse à chaque instant en vocalises sublimes, composant ici le mythe universel d'une humanité confrontée à ses propres démons...

Avis
Dur dur de commenter un si grand classique, mais je vais essayer de rendre au mieux mes impressions. J'étais partie au début pour lire cette pièce en anglais, pas du tout par prétention, plutôt pour juger par moi-même de l'écriture de Shakespeare. J'avais déjà lu quelques pièces de lui, mais les traductions ne peuvent pas égaler un texte en version originale, surtout quand il s'agit de théâtre. Bref, j'ai donc lu tout le premier acte en VO, et je vous dis : heureusement que j'ai relu après en français, sinon je serais passée à coté de certains détails très importants x). En plus c'est du vieil anglais, je m'y connais pas trop. Mais bon, contente d'avoir pu voir un tout petit peu à quoi ça ressemblait du "vrai" Shakespeare.

Avant que je lise cette pièce, on m'avait raconté que tous les personnages principaux mourraient, j'avais donc hâte de savoir pourquoi et comment. Au final, Hamlet n'est l'auteur "que" de deux meurtres, dont un provoqué accidentellement. Je suis peut-être grave, mais dans la dernière scène, quand ils meurent quasiment tous à la suite, ça m'a fait marrer. On trouve aussi des batailles pour conquérir des royaumes, tout le toutim habituel j'ai envie de dire. D'ailleurs une petite remarque qui n'a pas beaucoup d'importance, mais ici aussi ils se battent pour le royaume de Pologne. Je sais pas si c'est la mode ou quoi dans les pièces de théâtre puisque c'est également le cas dans La Vie est un Songe et dans Ubu Roi, et sûrement d'autres... Bref, la pièce est bel et bien une tragédie, au sens qu'on trouve habituellement dans les pièces de théâtre. Mais c'est aussi une tragédie intérieure au personnage d'Hamlet. Il connaît le doute, l'illusion, se rend compte de la vanité de l'existence, cherche à s'en libérer, c'est ce qui rend le texte si fort j'ai trouvé.

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La Mort d'Ophélie, John Everett Millais

L'illusion, la vanité ; des thèmes bien propres au baroque. On retrouve également du théâtre dans le théâtre - soit une mise en abîme - lorsque des comédiens font leur apparition. Au cours de cette lecture, la pièce m'a beaucoup fait penser à La Vie est un Songe, de Calderón, parce que Hamlet ne sait plus ce qui est vrai et ce qui ne l'est pas, ce qui est réel et ce qui est rêve (le fameux "To be or not to be"). En même temps on comprend son doute, puisqu'il voit ressurgir le fantôme de son père défunt... J'ai donc trouvé que cette tragédie avait un côté baroque, et ça m'a beaucoup plu. La plupart des tirades d'Hamlet donnent un caractère pathétique - mais non moins superbe - aux scènes : il hésite, ne sait plus que croire, feint la folie, cherche à venger la mort de son père. Un des moments les plus forts de la pièce - et mon préféré - est lorsqu' Hamlet s'adresse à un crâne déterré dans le cimetière, se rendant compte que chaque être est quoi qu'il arrive destiné à mourir : "All that lives must die, passing through nature to eternity". C'est une pièce que j'aurais aimé étudier en cours, car je pense être passée à côté de certaines choses importantes.

En résumé : Pièce que j'ai trouvé extrêmement intéressante et que j'aimerais avoir l'occasion d'approfondir.


Extraits
* "I'll cross it, though it blast me. Stay, illusion! If thou hast any sound, or use of voice, speak to me."

* "A little more than kin, and less than kind. "

* "All that lives must die, passing through nature to eternity."

* "On a fait croire que, tandis que je dormais dans mon jardin, un serpent m'avait piqué. Ainsi, toutes les oreilles du Danemark ont été grossièrement abusées par un récit forgé de ma mort. Mais, sache-le, toi, noble jeune homme! le serpent qui a mordu ton père mortellement porte aujourd'hui sa couronne."

* "Il n’y a de bien et de mal que selon l’opinion qu’on a."

* "Ils sont le résumé, la chronique abrégée des temps." (à propos des comédiens)

* "Mettez l’action d’accord avec la parole, la parole d’accord avec l’action, en vous appliquant spécialement à ne jamais violer la nature; car toute exagération s’écarte du but du théâtre qui, dès l’origine comme aujourd’hui, a eu et a encore pour objet d’être le miroir de la nature, de montrer à la vertu ses propres traits, à l’infamie sa propre image, et au temps même sa forme et ses traits dans la personnification du passé."

* "Pardonne-moi ces paroles, ô ma vertu ! car, au milieu d’un monde devenu poussif à force d’engraisser, il faut que la vertu même demande pardon au vice, il faut qu’elle implore à genoux la grâce de lui faire du bien."

* "I must be cruel, only to be kind" : "Il faut que je sois cruel, rien que pour être humain".

* "Me prenez-vous pour une éponge, monseigneur ?"

Publié dans : Policier

le 14/7/10

http://milkymoon.cowblog.fr/images/Livres/stieglarssonmillenium11219223417.jpgMillénium 1 : Les hommes qui n'aimaient pas les femmes
(Män som hatar kvinnor)
Stieg Larsson
2005

Challenge Livraddict 2010 : 2/7

Quatrième de couverture
Ancien rédacteur de Millénium, revue d'investigations sociales et économiques, Mikael Blomkvist est contacté par un gros industriel pour relancer une enquête abandonnée depuis quarante ans. Dans le huis clos d'une île, la petite nièce de Henrik Vanger a disparu, probablement assassinée, et quelqu'un se fait un malin plaisir de le lui rappeler à chacun de ses anniversaires.
Secondé par Lisbeth Salander, jeune femme rebelle et perturbée. placée sous contrôle social mais fouineuse hors pair, Mikael Blomkvist, cassé par un procès en diffamation qu'il vient de perdre, se plonge sans espoir dans les documnts cent fois examinés, jusqu'au jour où une intuition lui fait reprendre un dossier.
Régulièrement bousculés par de nouvelles informations, suivant les méandres des haines familiales et des scandales financiers. lancés bientôt dans le monde des tueurs psychopathes, le journaliste tenace et l'écorchée vive vont résoudre l'affaire des fleurs séchées et découvrir ce qu'il faudrait peut-être taire.

A la fin de ce volume, le lecteur se doute qu'il rencontrera à nouveau les personnages et la revue Millenium. Des fils ont été noués, des portes ouvertes. Impatient, haletant, on retrouvera Mikael et sa hargne sous une allure débonnaire, et Lisbeth avec les zones d'ombre qui l'entourent, dans : Millénium 2 - La fille qui rêvait d'un bidon d'essence et d'une allumette ; Millénium 3 - La Reine dans le palais des courants d'air.

Avis
♠ Un début lent ♠
J'ai mis un temps fou avant d'entrer dans l'histoire. Les premières 100 pages ne m'ont pas accrochées, parce que c'était assez flou : on nous présente successivement plusieurs personnages qui n'ont aucun lien ente eux, en plus en s'attardant beaucoup sur des détails, donc il était difficile de voir à quoi tout ça allait mener. J'ai du même refaire des aller-retours vers les premières pages pour me remémorer le début.
♠ L'énigme de la disparition d'Harriet ♠
J'ai trouvé que l'histoire prenait un réel coup d'accélération quand Mikael Blomkvist était embauché par Henrik Vanger pour élucider la disparition de sa nièce Harriet il y a une quarantaine d'années de cela. Plus l'enquête progresse et plus on est plongé dans l'histoire ; on a envie d'en apprendre plus, de démêler les noeuds, recoller les morceaux, et découvrir la vérité. Je ne suis pas fan des romans policiers, mais j'avoue que j'ai trouvé celui-ci excellent. Au fur et à mesure, on se rend compte que ce n'est pas une disparition mystérieuse qu'il faut résoudre, mais un ou des tueurs en série qu'il faut identifier. Le rapport entre les viols / meurtres et les passages bibliques était vraiment tordu et immonde, mais d'un autre côté j'ai trouvé ça tellement intelligent de la part de l'auteur de s'en servir pour mettre en scène une partie de son histoire. Ca m'impressionne toujours la manière dont un auteur de policiers s'y prend pour construire l'enquête et ne nous révéler la vérité qu'au fur et à mesure. J'ai donc beaucoup aimé toute cette partie du livre axée autour de la disparition d'Harriet Vanger.
♠ L'affaire Wennerström ♠
Par contre je suis restée en surface en ce qui concerne toute l'affaire Wennerström. Ce n'est franchement pas dans cette partie que le livre brille le plus, il ne s'agit que d'un prétexte pour réouvrir l'enquête sur Harriet. J'explique schématiquement : Blomkvist a été condamné pour diffamation sur l'industriel Wennerström. Henrik Vanger profite de son retrait de la scène journalistique pour faire appel à lui afin d'élucider ce qu'il pense être le meurtre de sa nièce. En échange, il lui promet de lui livrer Wennerström et donc de retrouver sa crédibilité. Sauf qu'au final il n'en est rien et Mikael arrive finalement à se débrouiller sans Henrik pour attaquer Wennerstroem avec de solides preuves cette fois-ci. Le livre se termine sur la conclusion de cette affaire, et ça m'a légèrement déçue par rapport à l'autre enquête qui est cent fois plus intéressante. Autre point négatif : la traduction française donne parfois des trucs vraiment bizarres et maladroits, même si on comprend l'idée générale.
 
♠ Les personnages ♠
Dans l'ensemble j'ai bien aimé toute la panoplie de personnages acteurs dans cette enquête : psycopathes, sadiques, misogynes ; je trouve que le livre porte bien son nom. Enfin, je ne peux parler de Millenium sans évoquer le superbe personnage de Lisbeth Salander. Une fille tout ce qui a de plus paradoxal. D'apparence fragile, voire anorexique, au look extravagant, "handicapée" sociale et placée sous tutelle depuis son adolescence, elle se révèle être une hackeuse de génie, d'un sang-froid étonnant et avec des répliques tellement classes. Je suis ravie de la fin, de la voir tomber amoureuse, de s'épanouir dans ses sentiments, (et évidemment d'en souffrir).
Je me demande ce que vaut le film, et ai hâte de découvrir les deux autres tomes de la série.

En résumé : Un début flou qui traine en longueur et pas très captivant mais je ne regrette absolument pas d'avoir persévéré : ce bouquin se révèle être une enquête fascinante et fiscelée avec brio.


Extraits
* "Son maquillage indiquait qu'elle était peut-être daltonienne."

* "Il s'est magistralement grillé, constata Salander avec lucidité."

* "J'ai eu de nombreux ennemis au fil des ans. J'ai appris une chose, et c'est de ne pas accepter un combat quand tu es sûr de le perdre. Par contre, ne laisse jamais s'en tirer quelqu'un qui t'a démoli. Sois patient et riposte quand tu seras en position de force - même si tu n'as pas besoin de riposter."

* "- Tu veux rencontrer un industriel de légende ? demanda Mikael.
- Est-ce qu'il mord ?
- Pas le samedi."

Publié dans : Romans XX°

le 15/6/10

http://milkymoon.cowblog.fr/images/Livres/Celine.pngVoyage au bout de la nuit
Louis-Ferdinand Céline
1932

Challenge ABC : 26/26

Quatrième de couverture
"- Oh ! Vous êtes donc tout à fait lâche, Ferdinand ! Vous êtes répugnant comme un rat...
- Oui, tout à fait lâche, Lola, je refuse la guerre et tout ce qu'il y a dedans... Je ne la déplore pas moi... Je ne me résigne pas moi... Je ne pleurniche pas dessus moi... Je la refuse tout net, avec tous les hommes qu'elle contient, je ne veux rien avoir à faire avec eux, avec elle. Seraient-ils neuf cent quatre-vingt-quinze millions et moi tout seul, c'est eux qui ont tort, Lola, et c'est moi qui ai raison, parce que je suis le seul à savoir ce que je veux : je ne veux plus mourir."


Avis
Enfin ! Je suis restée bien 5 mois sur ce livre... oui j'ai du mal avec les longs romans. C'est pas faute d'être ennuyeux, au contraire. J'ai trouvé l'écriture... juste géniale. L'histoire en elle même ne m'a pas toujours beaucoup captivée, mais la manière dont le narrateur t'envoie son histoire en pleine face, comme s'il te la crachait son histoire, c'était excellent.

Le récit de Ferdinand Bardamu se décompose en 5 phases. La première, c'est la guerre. Mais la guerre l'ayant plus que dégouté, il quitte la France pour une colonie en Afrique. Je pense que c'est la partie que j'ai préférée, l'environnement tropical toussa toussa, j'aime beaucoup. Mais là encore, le système colonial le répugne. "La poésie des Tropiques me dégoutait. Mon regard, ma pensée sur ces ensembles me revenait comme du thon." Ce qui conduit notre ami Bardamu à New York, où il fait la rencontre du capitalisme américain. "Quand les fidèles entrent dans leur Banque, faut pas croire qu'ils peuvent se servir comme ça selon leur caprice. Pas du tout. Ils parlent à Dollar en lui murmurant des choses à travers un petit grillage, ils se confessent quoi." Il revient donc en France où on le retrouve une dizaine d'année plus tard, exerçant la profession de médecin... oui ça m'a surprise, c'était bien la dernière des professions que je le voyais exercer. Enfin soit. Cette partie du roman est celle où j'ai le moins accroché, ça se passe dans une banlieue parisienne, et Bardamu s'occupe essentiellement de malades. On sentait une certaine résignation, une sorte de fatalité dans son ton. "Bientôt, il n'y aura plus que des gens et des choses inoffensifs, pitoyables et désarmés tout autour de notre passé, rien que des erreurs devenues muettes". Enfin, la dernière partie de son histoire se déroule dans un asile, c'est gai.

A chaque étape, Bardamu tombe comme par hasard sur Robinson, un type qu'il rencontre pendant la guerre. C'est comme si leur destin était lié. A chaque fois quand Robinson disparaissait, on se croyait débarrassé de lui, mais non, il est là jusqu'à la fin. En parlant de fin, eh bien, elle m'a laissée perplexe la fin. Tout ça pour dire que j'ai vraiment beaucoup aimé l'écriture, ce ton de lâcheté, de passivité complète. Bardamu est un anti-héros, je sais pas si la comparaison est pertinente mais il m'a rappelé L'étranger de Camus. On comprend mieux ce qu'évoque le titre, cette "nuit" dans laquelle il s'enfonce et s'enfonce, cette pourriture du monde dont il s'efforce de rendre compte. Petite note : Céline s'est inspiré de son expérience personnelle de la guerre de 14/18 et en tant que médecin pour écrire ce livre, mais ce livre n'est toutefois pas une autobiographie.

En résumé : Avec du recul, ce livre m'a marquée. Le style incomparable de la narration, la vision du monde de cet anti-héros persistent dans ma mémoire, et c'est le signe que j'ai affaire à un excellent bouquin.


Extraits
* "Les fleurs c'est comme les hommes. Plus c'est gros et plus c'est con."

* "candidement cannibale"

* "Il offrait à cette petite fille lointaine assez de tendresse pour refaire un monde entier, et cela ne se voyait pas."

* (à propos des crépuscules) : "Tragiques chaque fois comme d'énormes assassinats du soleil."

* "Il s'appelait "Surgeon général" ce qui serait un beau nom pour un poisson."

* "A 37° tout devient banal."

* (à propos du métro) : "rempli de viandes tremblotantes"

* "On aurait dit des grosses bêtes bien dociles, bien habituées à s'ennuyer."

* "mon néant individuel"

* "une sorte de moulin à café à monnaie."

* "L'existence ça vous tord et ça vous écrase la face."

* "C'est le voyageur solitaire qui va le plus loin."

* "L'avenir, je vois comment qu'y sera... Ca sera comme une partouze qui n'en finira plus."

* "des précautions d'assassinat"

* (à propos des journaux) : "formidable artichaut de nouvelles en train de rancir"

* "Ah il y en a qui vont au Théâtre pour se faire des émotions ! Mais je vous le dis : il est ici le théâtre !"

* "La vie n'est qu'un délire tout bouffi de mensonges."

* "Quand on commence à se cacher des autres, c'est signe qu'on a peur de s'amuser avec eux. C'est une maladie en soi. Il faudrait savoir pourqoi on s'entête à le pas guérir de la solitude."

* "Un fou, ce n'est que les idées ordinaires d'un homme mais bien enfermées dans une tête."

* "Et ce n'est plus, autour d'eux, qu'une ragouillasse dégueulasse de débris organiques, une marmelade de symptômes de délires en compote."


 
Point Challenge ABC
Ainsi s'achève mon challenge ABC, dans les délais ! J'ai fait d'excellentes découvertes : La vie devant soi de Romain Gary, Si c'est un homme de Primo Levi, Le meilleur des mondes d'Aldous Huxley, La disparition de Georges Perec pour ne citer que ceux qui m'ont le plus marquée. Je ne pense pas recommencer de nouveau ce challenge, je n'aime pas vraiment lire par contrainte. Et puis pour l'instant il me reste le Challenge Livraddict à terminer. Qui sait peut-être que je retenterai l'année prochaine ?

Publié dans : Moyen-Âge

le 22/5/10

http://milkymoon.cowblog.fr/images/renart.gifLe Roman de Renart
Anonyme
XII° - XIII° siècle

Challenge ABC : 25/26

Quatrième de couverture

Renart, rusé, habile, et surtout beau parleur, a plus d'un tour dans son sac lorsqu'il s'amuse à piéger Ysengrin, le loup sot et glouton, Tiécelin le corbeau, Chantecler le coq, Dame Pinte la poule... Mais, las d'être dupés par ce goupil malicieux, les animaux lui complotent à leur façon un drôle de surprise. Rira bien qui rira le dernier !

Avis
Quand j'ai eu fini de le lire, j'avais l'impression que ce serait un cercle vicieux, une histoire sans fin qui recommencerait inlassablement et se terminerait toujours de la même façon. Les personnages ne tirent aucune morale du comportement de Renart et c'est bien dommage. De plus, les chapitres sont hyper répétitifs, et il y a quelques détails dont on se passerait bien (pourtant j'ai lu une version abrégée, c'est pour dire...).
D'un point de vue un peu plus objectif, ce livre est un des premiers romans, dans le sens littéral du terme, c'est à dire écrit en langue romane et non latine. Cette histoire s'est d'abord transmise oralement par les troubadours et tout. Elle est constituée de plusieurs "branches" qui ont été regroupées pour donner une certaine unité. Dans un des chapitres, j'ai cru avoir sous les yeux une fable de la Fontaine : le Corbeau et le Renard, mais apparemment cette fable était très répandue et on la retrouve chez de nombreux auteurs. Et pour la petite histoire, le nom de "Renart" le goupil a dérivé en "renard" dans notre vocabulaire courant.

En résumé : Un ennui profond.


Extraits

* "Tel se plaint qui n'a pas le moindre mal."

* "Qui tout désire tout perd."

Publié dans : Contes/Nouvelles

le 1/5/10

http://milkymoon.cowblog.fr/images/Livres/orientales.gifNouvelles Orientales
Marguerite Yourcenar
1938

Challenge ABC : 24/26

Quatrième de couverture
Avec ces Nouvelles, écrites au cours des dix années qui ont précédé la guerre, la tentation de l'Orient est clairement avouée dans le décor, dans le style, dans l'esprit des textes. De la Chine à la Grèce, des Balkans au Japon, ces contes accompagnent le voyageur comme autant de clés pour une seule musique, venue d'ailleurs. Les surprenants sortilèges du peintre Wang-Fô, " qui aimait l'image des choses et non les choses elles-mêmes ", font écho à l'amertume du vieux Cornelius Berg, " touchant les objets qu'il ne peignait plus ". Marko Kralievitch, le Serbe sans peur qui sait trompait les Turcs et la mort aussi bien que les femmes, est frère du prince Genghi, sorti d'un roman japonais du XIe siècle, par l'égoïsme du séducteur aveugle à la passion vraie, comme l'amour sublime de sacrifice de la déesse Kâli, " nénuphar de la perfection ", à qui ses malheurs apprendront enfin l'inanité du désir... "

Avis
Point Challenge
A la base je ne voulais pas lire ce livre pour le challenge, mais je me suis dit que je me réserverai Kitchen de Banana Yoshimoto pour le challenge ABC prochain. En parlant du challenge, j'ai enfin trouvé quoi lire pour ma lettre en X, enfin. Comme me l'a astucieusement proposé 100choses, je vais prendre un roman anonyme, écrit par une personne X... *roulement de tambours* : Le roman de Renart.
 
Le contenu des nouvelles
Alors que dire de ces nouvelles orientales ? J'ai beaucoup aimé ce côté oriental, justement. Ca change de l'ordinaire, on plonge avec plaisir dans des régions inhabituelles. La plupart des nouvelles m'ont beaucoup plu, d'autre moins. Ma préférée reste la première : Comment Wang-Fô fut sauvé, qui dégage une poésie très délicate. Une chose qui m'a dérangée, ce sont les passages assez durs : sanglants, et de la torture (notamment Marko crucifié ou Kostis le Rouge). Passages difficiles à avaler parce que je suis une âme sensible, mais d'un autre côté ils sont indispensables pour créer l'atmosphère voulue par l'auteur et cette impression d'ensemble que j'en garde. A part ça, j'ai trouvé dans ces nouvelles beaucoup de soleil et de poésie. Je fermais les yeux et avais l'impression de me trouver sur une de ces îles grecques baignée dans le soleil. On cottoie des déesses (Kâli, "nénuphar de la perfection"), des nymphes, des peintres, des sauvages, et l'amour. L'amour maternel d'une femme pour son bébé, un amour parmi tant d'autres du prince Genghi, l'amour étrange de Panégyotis pour les Néréides, l'amour impossible d'Aphrodissia pour Kostis le Rouge... On quitte le mode de vie occidental, c'est totalement différent, j'ai adoré ce dépaysement. Ces contes sont un monde à part, inconnu au lecteur, et c'est ce qui fait tout leur charme.

La forme du recueil
Je voudrais mettre en évidence le "mouvement" de ce recueil. L'ordre des nouvelles n'a pas été choisi par hasard (du moins c'est ainsi que je le comprends). Pour commencer, la fuite du peintre Wang-Fô annonce l'univers de toutes ces nouvelles. Wang-Fô, dans sa barque, nous montre le chemin, et on le suit. Les nouvelles s'enchaînent. Les trois dernières, elles, présageaient la fin de cet univers, comme si elles nous préparaient à le quitter. Il y a comme de la nostalgie, surtout dans la dernière, où on rentre en Europe avec Cornélius Berg. Je n'ai pas encore parlé de la superbe écriture de Marguerite Yourcenar, très très bonne découverte. J'ai hâte de me plonger dans L'Oeuvre au Noir qui attend patiemment sur mon étagère depuis 2 ans.

En résumé : Une très belle découverte de la plume de Marguerite Yourcenar. Ces nouvelles m'ont complètement dépaysée. J'y ai trouvé beaucoup de soleil et de poésie.


Extraits
* "Le monde n'est qu'un amas de taches confuses, jetées sur le vide par un peintre insensé, sans cesse effacées par nos larmes."

* "Cet homme raffiné peut enfin goûter tout son saoul au luxe suprême qui consiste à se passer de tout."

* "Genghi lisait les Ecritures et trouvait à ces versets austères une saveur qui manquait désormais pour lui aux plus pathétiques vers d'amour."

* "Il lui fallut se rendre compte que les ténèbres pour lui commenceraient avant la mort."

* "Dans un univers où tout passe comme un songe, on s'en voudrait de durer toujours."

* "Ses oreilles un peu allongées encadraient obliquement son crâne à la façon des anses d'une amphore."

* "Il est sorti du monde des faits pour entrer dans celui des illusions, et il m'arrive de penser que l'illusion est peut-être la forme que prennent aux yeux du vulgaire les plus secrètes réalités."

* "un jeune pin écailleux dont la résine versait des pleurs d'or"

* "Dieu est un grand peintre."

* "son harem floral"

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