"Leurs coeurs battaient tous deux, sur un rythme de boogie." L'écume des jours - Vian

Publié dans : Théâtre

le 30/5/10

http://milkymoon.cowblog.fr/images/cook.jpgSupplément au voyage de Cook
Jean Giraudoux
1935

Résumé

Mr et Mrs Banks, naturalistes de l'équipage du capitaine Cook, débarquent à O'Tahiti : puritains anglais du XVIIIe siècle, ils doivent inculquer aux indigènes les trois piliers sacrés de leur civilisation : Travail, Propriété et Moralité. Les autochtones opposent prodigalité, liberté, et insouciance. Les Banks voient leurs certitudes vaciller.

Avis
On est en 1935 quand Giraudoux écrit cette pièce, ce n'est plus l'époque des grands discours satiriques sur la colonisation, comme l'avaient fait autrefois de nombreux auteurs, et notamment Diderot dans "Supplément au voyage de Bougainville". Giraudoux reprend l'idée et la reconcocte à sa sauce pour en faire quelque chose de drôle et léger. Les thèmes de l'altérité, de l'esclavage, de la colonisation de l'Homme blanc sont présents, of course. Mais c'est dans l'humour que Giraudoux aborde le sujet, et j'ai totalement adoré. Il y a continuellement une confrontation entre les coutumes des colons et les coutumes des indigènes, et on voit bien qu'elles sont incompatibles. Je ne vais pas vous faire un cours sur ces différences culturelles, vous les imaginez bien. Je cherche surtout à mettre l'accent sur la manière dont l'auteur s'y prend pour en parler et que j'ai trouvée géniale. Les Banks qui pensaient contrôler les tahitiens pour se faire de l'argent, se retrouvent malgré eux à adopter leur mode de vie et leur mentalité, ce qui donne lieu à des situations et des dialogues excellents. En plus j'ai pu voir cette pièce au théâtre, et voir une pièce au théâtre vaut mille fois mieux que de la lire, c'est certain.

En résumé : J'ai adoré avec quel trait d'humour Giraudoux dépeignait la colonisation.

Publié dans : Théâtre

le 20/4/10

http://milkymoon.cowblog.fr/images/Livres/musset-copie-1.jpg On ne badine pas avec l'amour
Alfred de Musset
1834

Résumé

On siffle sa première pièce ? Musset s'en moque, il publiera les autres pour son plaisir, insouciant d'aucune règle, sauf celle de ses caprices et de sa fantaisie douloureuse et si légère. Ce sera son "spectacle dans un fauteuil". c'est pourquoi on ne cessera jamais de jouer ses comédies et proverbes. Dans quel rêve, quel château, quel parc mélancolique sommes-nous ? Le jeune seigneur Perdican devrait y épouser sa cousine Camille, mais en un instant il décide d'aimer une jeune bergère. Soudain dédaignée, Camille, qui ne croyait pas à l'amour, connaît le dépit, la jalousie, l'égoïsme de la passion. Autour d'eux, s'agitent des personnages fantoches d'une cocasserie irrésistible. Dans ce théâtre féérique, on se croise, on se déchire, on s'ennuie, on croit que tout est vain, on triche, on se désire, on souffre jusqu'à en mourir. Comme dans la vie.

Avis
J'ai beaucoup aimé cette pièce qui change de l'ordinaire. La scène d'exposition est énorme : un choeur (façon théâtre grec) présente l'arrivée de Perdican puis en parallèle présente de la même façon celle de Camille. Ca donne un résultat proche de la farce, les personnages sont grotesques et caricaturaux. En gros, on ne s'attend pas du tout à ce que la pièce tourne autour d'une histoire d'amour.

Mais parler d'une histoire d'amour serait une erreur. Camille et Perdican ne s'aiment pas, non. Ils jouent avec ce sentiment sans vraiment le ressentir. C'est ça qui est cool dans la pièce. J'ai adoré tous leurs dialogues : ils se blessent l'un l'autre, en tromperies, mensonges, mises en scène, lettres et cadeaux, jalousie... Le titre est d'ailleurs assez évocateur à ce sujet.

A la fin, ça n'est plus très clair, on ne comprend pas bien leurs réels sentiments. Finalement ils s'aiment, puis ils ne s'aiment plus, puis l'un re-aime l'autre, etc. Et au final, je suis un peux restée perplexe par rapport à la dernière phrase de la pièce.

En résumé : Une de mes pièces préférées ; avec des personnages, une scène d'exposition et des dialogues excellents.


Extrait
Adieu, Camille, retourne à ton couvent, et lorsqu’on te fera de ces récits hideux qui t’ont empoisonnée, réponds ce que je vais te dire : Tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux et lâches, méprisables et sensuels ; toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dépravées ; le monde n’est qu’un égout sans fond où les phoques les plus informes rampent et se tordent sur des montagnes de fange ; mais il y a au monde une chose sainte et sublime, c’est l’union de deux de ces êtres si imparfaits et si affreux. On est souvent trompé en amour, souvent blessé et souvent malheureux ; mais on aime, et quand on est sur le bord de sa tombe, on se retourne pour regarder en arrière ; et on se dit : "J’ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois, mais j’ai aimé. C’est moi qui ai vécu, et non pas un être factice créé par mon orgueil et mon ennui. " (Acte II, Scène V)

Publié dans : Théâtre

le 21/3/10

http://milkymoon.cowblog.fr/images/Livres/uburoi.jpgUbu Roi
Alfred Jarry
1896

Challenge ABC : 20/26

Résumé
Le Père Ubu, convaincu par son épouse, décide de renverser le roi de Pologne pour prendre sa place et régner comme bon lui semblera sur le royaume...

Avis
Hum que dire que dire... Une pièce qui se laisse lire, mais sans plus. Au théâtre on est habitué à des histoires d'amour impossibles (exemple, exemple, exemple, exemple), dans cette pièce c'est un tout autre sujet. Le héros est un personnage bouffon, immoral et grossier, et veut renverser le roi de Pologne avec l'aide de sa femme qui n'est pas mieux que lui : voleuse, ivrogne et manipulatrice.
Cette pièce m'a un peu rappelé La Cantatrice Chauve de Ionesco. On a en effet des personnages grotesques (Père Ubu et Mère Ubu), une situation vraiment improbable... La pièce rompt avec le théâtre plus "classique". On dit d'ailleurs d'elle qu'elle est le précurseur du théâtre de l'absurde ; théâtre qu'on retrouve totalement dans La Cantatrice Chauve.
En même temps, cette pièce m'a beaucoup fait penser à La Vie est un Songe de Calderón. L'action se passe en Pologne, il y a des grottes en veux-tu en voilà, de la neige, des peaux d'ours, des rois qui dilapident leur fortune, un personnage qui s'appelle Sigismond et un autre Rosemonde.

En résumé : Une pièce qui s'annonce en rupture avec le théâtre "classique", mais qui ne m'a pas plus emballée que ça.


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Et ô surprise, j'étais en train de chercher l'image du livre quand je suis tombée sur ça.
Oui les amis, le tableau d'el Señor Joan Miró sur Ubu Roi. Y'en a toute une série d'ailleurs.
J'aime beaucoup Miró, mais là j'ai franchement du mal à voir quel moment de la pièce ça illustre.

Publié dans : Théâtre

le 15/3/10

http://milkymoon.cowblog.fr/images/Livres/artt.jpgArt
Yasmina Reza
1994

Challenge ABC : 19/26

Résumé
Marc est invité par son ami Serge à venir voir sa nouvelle acquisition : un tableau blanc avec de fins liserés blancs transversaux. Une toile d'environ un mètre soixante sur un mètre vingt peinte en blanc que Serge vient d'acheter 200 000 francs. Atterré par cet achat, Marc s'interroge et va trouver Yvan, leur ami commun, pour lui faire part de son incompréhension à propos de ce geste. Entre les trois amis s'engage alors une discussion qui ira bien au-delà de la seule question de l'art contemporain...

Avis
Une pièce drôle, qui traite d'un sujet d'actualité. On a tous notre propre opinion sur l'art contemporain. Certains le jugent absurde, inutile, d'autres y voient le summum de l'expression artistique. Eh bien cette pièce fait le tour de la question avec les personnages de Marc, Serge et Yvan qui adoptent chacun une position différente face au "tableau blanc avec de fins liserés blancs transverseaux." Mais cette discussion les mènera bien plus loin, et analysera les fondements de leur relation. Au delà de la pièce, j'ai vraiment adoré la précision de l'écriture de Yasmina Reza.

En résumé : Une pièce "modernissime" (pour faire un clin d'oeil au texte), qui dépeint avec humour l'art contemporain.


Extraits
* "Il faut toujours surveiller ses amis, sinon ils vous échappent."

* "La surprise est une chose morte à peine conçue."

* "Je veux être votre ami, Yvan le farfadet."

Représentation
J'ai trouvé une représentation filmée de la pièce en ligne, avec Pierre Arditi, Fabrice Luchini et Pierre Vaneck. Si vous n'avez rien à faire je vous la conseille, qui sait, ça pourrait vous réconcilier avec le théâtre ?
 
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Publié dans : Théâtre

le 24/1/10

http://milkymoon.cowblog.fr/images/Livres/cyranoo.png Cyrano de Bergerac
Edmond Rostand
1897

Résumé
« C'est un roc !... c'est un pic ! c'est un cap !Que dis-je, c'est un cap ? C'est une péninsule ! »
La scène se passe en 1640. Provoqué par un fâcheux, Cyrano se moque. De lui-même et de son nez, objet de sa disgrâce. Séduire Roxane ? Il n'ose y songer. Mais puisqu'elle aime Christian, un cadet de Gascogne qui brille plus par son apparence que par ses reparties, pourquoi ne pas tenter une expérience ? « Je serai ton esprit, tu seras ma beauté, dit Cyrano à son rival. Tu marcheras, j'irai dans l'ombre à ton côté. »
Jeu étrange et dangereux. Christian ne s'y trompe pas. À travers lui, la belle en aime en fait un autre. Mais Cyrano, s'il entrevoit le bonheur un instant, ne peut oublier son physique ingrat. Un drame qui tourne au tragique. Et pourtant quel panache dans cet impossible amour...
 
 
Avis
Cette pièce est sublime, magnifique, grandiose, touchante, pleine de poésie, d'honneur et d'amour. La légende dit qu'après la première représentation au Théâtre de la Porte Saint-Martin, le public a redemandé les acteurs 17 fois. Placée largement en tête de mes oeuvres préférées, c'est un joyau de littérature, terriblement sensible. La diversité des thèmes abordés, les personnages, font de cette pièce un incontournable.
Le héros a pour nom celui d'une personne qui a bel et bien existé dans les années 1619-1655.

Il y a tellement de choses que j'ai aimé dedans. Commençons par le triangle amoureux. Christian, amoureux de Roxanne, a certes la beauté mais pas assez d'esprit pour conquérir le coeur de cette précieuse. Cyrano lui propose son aide, et c'est à travers ses lettres qu'il pourra lui aussi exprimer son amour pour Roxanne. Roxanne, persuadée d'aimer un homme beau et intelligent, ne découvrira la vérité que 10 ans plus tard, juste avant la mort du véritable homme qu'elle a aimé. La fin est magistrale ; le dernier mot prononcé par Cyrano met un point d'honneur à la pièce.

Je tiens aussi à souligner la grande souplesse d'écriture de Rostand. La pièce est entièrement en alexandrins, mais on n'est pas du tout dans les contraintes de la tragédie ou de la comédie du XVII ème siècle. C'est un vrai régal à lire, à jouer également. Les trouvailles de la langue sont excellentes, je citerai par exemple le boulanger Ragueneau. Amoureux des pâtisseries et de la poésie, il n'hésite pas à mélanger astucieusement les deux (acte II scène I):
Vous avez mal placé la fente de ces miches
Au milieu la césure, -entre les hémistiches !


La bien connue scène du balcon, où Cyrano, caché, souffle les mots à Christian pour qu'il aille recueillir un baiser de Roxanne, résume finalement bien le problème de toute la pièce. Christian a la beauté, Cyrano a l'esprit. Lui doit se cacher, vivre dans l'ombre d'un autre (à cause de la laideur de son nez). Cette scène est devenu un classique, repris dans plusieurs autres oeuvres.

En résumé : Ecriture sublime, histoire géniale ; tout simplement ma pièce de théâtre préférée.


Représentation
Le film de 1990 de Jean-Paul Rappeneau avec Gérard Depardieu rend un brillant hommage à la pièce. Lisez la absolument, même si je sais qu'en général vous n'êtes pas de grands fan de théâtre !
 

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